Ce texte ayant pour thématique « la justice » circule sur le web, nous avons voulu vous le divulguer ici.
Le titre troublant (La Poste au tribunal mardi, accusée par un syndicat de «fermer les yeux» sur «l’exploitation de sans-papiers») est sans ambages.
Présenté sous la signature «d’anonymat
», l’auteur est reconnu comme quelqu’un de sérieux pour d’autres textes qu’il a publiés sur le web.
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La Poste comparaîtra mardi au tribunal de Paris, assignée par le syndicat Sud PTT qui l’accuse de manquer à son « devoir de vigilance » sur les conditions d’emploi de travailleurs sans-papiers au sein de ses filiales Chronopost et DPD France. Le syndicat reproche à La Poste de « fermer les yeux sur ce qui se passe dans ces entrepôts où sont exploités des sans-papiers » alors qu’elle a « l’obligation de prendre des mesures concrètes (et pas uniquement de belles déclarations) vis-à-vis de ses sous-traitants », dénonce Sud PTT dans un communiqué de presse.
Sud PTT a mis en demeure plusieurs fois La Poste depuis 2020, pointant du doigt des « insuffisances manifestes » dans la rédaction et la mise en œuvre de son plan de vigilance, obligatoire depuis une loi de 2017. Le syndicat lui demande de rendre publique une cartographie « des risques et atteintes graves envers les droits humains, les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes », selon une assignation de 2021 que l’AFP s’est procurée, mais aussi de publier la liste exhaustive de ses fournisseurs et sous-traitants, les procédures d’évaluation adaptées aux risques ainsi que de prendre des « mesures adéquates pour éviter le travail dissimulé ».
Après deux ans de procédures, le groupe se défendra mardi lors de l’audience au fond devant le tribunal judiciaire de Paris. Il dit réserver « selon l’usage, ses réponses et ses arguments » à la justice, mais précise toutefois à l’AFP avoir « toujours veillé au respect » de ses obligations, à savoir la publication annuelle d’un plan de vigilance « conforme à la loi », veiller à sa mise en œuvre « effective » et transcrite dans un compte-rendu, « en toute transparence vis-à-vis des organisations syndicales ».
« La Poste, avec l’ensemble de ses filiales, condamne fermement tout travail illégal », ajoute le groupe. « C’est la première fois en France qu’un juge tranchera sur le fond d’un dossier lié au devoir de vigilance », se réjouit le conseil de Sud PTT, Céline Gagey. « D’autres affaires existent, mais elles butent sur des questions de procédure ».
« Cascade de sous-traitants »
Un nombre croissant de multinationales se voient reprocher de ne pas respecter leur « devoir de vigilance », telles TotalEnergies, Suez, BNP Paribas, Casino, Yves Rocher, Teleperformance. Ce devoir leur a été imposé par une loi de 2017 obligeant les grosses sociétés françaises à publier un plan de vigilance sur les risques humains et environnementaux de leurs activités, y compris au sein de leurs filiales, fournisseurs et sous-traitants. À ce jour, aucune procédure n’a abouti à une condamnation.
En juin dernier, le Parlement européen a voté pour imposer aux entreprises de l’Union européenne un « devoir de vigilance », dont le texte doit encore être négocié avec les États membres. L’idée, c’est qu’en cas de manquement, le donneur d’ordre ne « puisse pas se cacher derrière une cascade de sous-traitants », explique Céline Gagey. Ce sujet de la sous-traitance est « d’actualité à l’heure des débats de la loi immigration qui portent sur la régularisation des sans-papiers dans les secteurs ‘en tension’ », souligne l’avocate.
En 2022, l’AFP avait rencontré des travailleurs sans-papiers de Chronopost et DPD en grève à Alfortville, dans le Val-de-Marne, depuis neuf mois, logés dans des abris de fortune au bord d’une zone industrielle. « Ils sont toujours là », s’exclame Nicolas Galépides, responsable fédéral de Sud PTT, interrogé par l’AFP.
Des centaines de personnes travaillent pour ces deux filiales de La Poste, embauchées par « des agences d’intérim véreuses », pour le compte de Derichebourg d’abord puis par Onet et Atalian, explique Nicolas Galépides.
La Poste avait été condamnée en 2020 pour prêt illicite de main-d’œuvre et marchandage après la mort d’un salarié non déclaré d’un sous-traitant, Seydou Bagaga, qui s’était noyé en voulant rattraper un colis dans la Seine. Après une cassation de la procédure, l’affaire est toujours en cours, précise Nicolas Galépides.
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