Ce papier ayant pour propos « la justice » circule sur le web, nous avons voulu vous le communiquer ci-dessous.
Le titre (« Un tribunal avant-gardiste » : les deux premières années hors normes du procureur de Bobigny) est sans ambiguïté.
Identifié sous le nom «d’anonymat
», le journaliste est connu et fiable.
Le texte peut ainsi être pris au sérieux.
La date d’édition est 2023-07-23 04:02:00.
Voilà ll’article dont il s’agit :
Publié le
C’est une machine gigantesque et inarrêtable. Le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) est parmi l’un des plus importants de France en matière d’affaires à gérer. Au sein de cette usine judiciaire qui tourne à plein régime, les yeux cernés des magistrats se heurtent quotidiennement à l’horreur et à la misère dans un des départements les plus violents de l’hexagone.
Depuis bientôt deux ans, Éric Mathais est procureur de la République de cette juridiction. Pour actu Seine-Saint-Denis, il est revenu sur cette expérience unique, où l’on bâtit sur un navire qui prend souvent l’eau.
Un environnement unique en France
Pour le magistrat, arrivé en 2021 à la tête du parquet de Bobigny, l’environnement est très particulier, comparé à ses précédentes expériences en Bretagne et en Côte-d’Or : « La Seine-Saint-Denis est le territoire le plus pauvre de France métropolitaine et le second pour ce qui est des violences ».
Un triste palmarès, qui a des origines démographiques et économiques, comme le souligne le magistrat : « Il y a officiellement 1,7 million d’habitants dans le département. En réalité, il y en a environ 2 millions, dont environ 300 000 sont sous les radars. À cela s’ajoute le fait que 17% de la population touche un salaire mensuel inférieur à 1 000 euros ».
Un tribunal, où l’innovation naît dans l’urgence
À Bobigny, la charge de travail est gargantuesque. D’un côté, une demande judiciaire forte, avec 220 000 plaintes et procès-verbaux traités chaque année dans le département. De l’autre, un tribunal qui manque de budget et d’effectifs. Ce cocktail a pour conséquence une lutte constante contre les défaillances.
En plus du fonctionnement de la justice, ces galères peuvent aussi paralyser la prise de décision, comme l’explique le procureur : « Il y a un risque d’être submergé par tous ces problèmes et de ne rien faire d’autre. Il faut savoir réagir en matière d’organisation ». À Bobigny, des difficultés naît l’innovation. « Pour donner un exemple, nous avons un stock de scellés au sein de la juridiction. Nous avons pris la décision novatrice de faire des dons d’une partie d’entre eux à la Croix-Rouge. Le tribunal s’est retrouvé à plusieurs reprises à l’avant-garde par ces idées. »
Autre exemple, une innovation a été mise en place comme une alternative aux poursuites : « Le prévenu peut faire un don à l’association SOS Victimes 93 en échange d’un abandon des poursuites. En 2023, 60 000 euros ont été récoltés de cette façon. C’est une manière de rééquilibrer les choses entre ceux qui commettent et ceux qui subissent les infractions ».
Retrouver des horaires décents
Qui dit audiences surchargées, dit audiences tardives. À l’arrivée d’Éric Mathais, la réputation du tribunal de Bobigny n’était pas des plus glorieuses. Avec des comparutions immédiates pouvant finir à quatre heures du matin, les magistrats avaient plus de chance de quitter le tribunal aux aurores qu’au crépuscule.
« C’est un problème sur lequel nous avons longuement travaillé. Nous avons limité les horaires de 13 heures à 21 heures, avec un maximum de 23 heures. Afin d’y arriver, nous avons lissé un maximum la charge de travail. C’est important pour la bonne application de la justice et l’image de la juridiction », assure Éric Mathais. Une charge de travail qui n’empêche pas le tribunal d’être attractif aux yeux des magistrats.
Nous avons un grand nombre de demandes à la sortie d’école. Il faut être bien classé pour intégrer la juridiction. Pour beaucoup de magistrats, le tribunal de Bobigny est l’occasion de se faire une expérience qui prépare à tout. C’est un peu une école de guerre.
Les violences intrafamiliales, un défi d’envergure
L’un des chantiers prioritaires du parquet de Seine-Saint-Denis, c’est celui des violences intrafamiliales, particulièrement celui des violences conjugales. En 2023, trois femmes sont mortes tuées par leur mari dans le département. « Entre 2017 et 2021, le nombre de condamnations pour des faits de violences au sein du couple a bondi de 100% à Bobigny ! La libération de la parole a en conséquence demandé des changements dans la politique pénale », détaille le procureur.
Afin de pallier cet afflux sans précédent de plaintes, des politiques ont été mises en œuvre : « Nous sommes très engagés sur cette thématique et nous avons été très innovants. Le téléphone grand danger a été inventé à Bobigny sous ma prédécesseuse. Nous avons développé un meilleur accueil des victimes dans les commissariats. Des audiences supplémentaires ont été mises en place pour faciliter le traitement des dossiers. Chaque mois, une audience foraine se tient et juge les violences conjugales. Nous essayons de faire un maximum de circuits courts pour que les procédures soient traitées le plus vite possible ». Les partenariats se multiplient. Par exemple, une convention signée avec les médecins de Seine-Saint-Denis pour signaler les violences.
En parallèle de ces évolutions, un chantier d’envergure est en cours : la création d’un pôle dédié aux violences intrafamiliales : « Une permanence dédiée du parquet va être créée. Six juristes assistants vont être recrutés autour des magistrats. Le but n’est pas de bouleverser ce qui se fait actuellement, mais de permettre une meilleure circulation des informations. Une chambre supplémentaire va être également créée pour réduire les délais ».
Enrichir les contacts avec les municipalités
Territoire réputé difficile, la Seine-Saint-Denis n’en demeure pas moins dotée de municipalités actives et d’un tissu associatif solide, selon Éric Mathais : « Les maires du département sont très engagés sur le terrain. Lors des émeutes urbaines le mois dernier, j’ai été constamment en contact avec eux. Une convention a par ailleurs été mise en place où les édiles ont accès à mon téléphone et à une adresse mail dédiée pour les urgences ».
Il est important de souligner que contrairement à d’autres services publics, la justice rapporte de l’argent à l’État. En 2022, les amendes ont rapporté 40 millions d’euros à Bobigny
Frapper les délinquants au portefeuille
Pour le procureur de la République, un bon moyen de stopper les délinquants, c’est de frapper au bon endroit, où se trouve le portefeuille : « La mise en place du bureau d’exécution des peines, où les condamnés paient directement, avec une remise de 20%, a permis de toucher 404 000 euros en 2022, contre 378 000 euros en 2021″.
Concernant les avoirs criminels, engrangés dans de multiples trafics, le tribunal de Bobigny n’a pas à rougir de sa comptabilité : « En 2023, c’est un total de 26 millions d’euros qui a été saisi. En comparaison, le total national est de 770 millions d’euros. Nous comptons créer deux cabinets d’instruction supplémentaires pour lutter davantage contre la délinquance financière », indique le procureur de la République.
Le défi des Jeux olympiques
Si dans moins d’un an, les athlètes vont transpirer lors des Jeux olympiques, ce sera aussi le cas du personnel du tribunal. Fin 2022, le procureur et le président du tribunal ont alerté sur l’état de la juridiction et le coup que pourrait porter l’évènement sportif. Six mois après, quelle réponse à ce signal d’alarme ? « Nous avons été entendus, mais pas à la hauteur de la demande. En septembre, nous aurons 58 magistrats, et nous devrions atteindre 63 dans les mois qui suivent. De nouveaux greffiers devraient arriver au mois de novembre. »
Comme le détaille le magistrat, les Jeux olympiques seront une valse judiciaire à trois temps : « Il y a l’avant, c’est-à-dire maintenant, avec le plan zéro délinquance. À partir de mars 2024, il y aura des audiences de délestage qui vont permettre de soulager les comparutions immédiates. Le deuxième temps, c’est l’été 2024, où une troisième chambre de comparution immédiate sera ouverte. Enfin, arrivera l’après, où le défi sera de gérer toutes les affaires liées aux Jeux olympiques dans un délai raisonnable ».
Redonner foi en la justice
Question criminalité, les maux du territoire demeurent inchangés pour le procureur de la République : « Nous allons continuer à lutter contre le trafic de stupéfiants, l’habitat indigne (où un assistant spécialisé sur ce sujet a été recruté), mais aussi le proxénétisme, particulièrement avec la postitution forcée de mineures. Le but est d’atteindre un taux de délinquance acceptable ».
Au-delà de ces défis, il est important pour le magistrat de redonner confiance aux habitants du département : « Il y a une forme d’insatisfaction qui est réelle, mais en communiquant sur les réseaux, on arrive à rassurer. Ça a été le cas pendant les émeutes. Je suis persuadé que le système judiciaire français est l’un des plus efficients du monde, surtout au vu du budget qui lui est alloué ». La communication, une mission de tous les jours pour Éric Mathais, qui totalise déjà plus de 7 000 followers sur Twitter.
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