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La semaine dernière, le 2 février, AG Emiliou a rendu son avis dans l’affaire Verband Sozialer Competition (C-543/21) concernant l’interprétation du « prix de vente » de la directive sur l’indication des prix (directive 98/6/CE). Les faits de l’affaire concernaient des yaourts et des boissons vendus dans des récipients en verre, que les consommateurs pouvaient retourner à des fins de réutilisation et de recyclage. Les produits ont été vendus à un prix total spécifié «plus … dépôt». La question débattue était de savoir si le prix de vente total aurait dû inclure le coût du dépôt.
L’article 2, sous a), de la directive 98/6 détermine comme «prix de vente» le «prix final pour l’unité d’un produit, ou une quantité déterminée du produit». Quelques points de l’avis d’AG Emiliou ont attiré mon attention :
Composantes finales du prix
AG Emiliou se réfère à une affaire antérieure en Citroën Commerce (C-475/14) où la Cour a déterminé deux conditions pour qualifier un élément du prix de « final » : 1) il doit s’agir d’une contrepartie pécuniaire pour l’acquisition du produit ; 2) son caractère inévitable et prévisible (paragraphes 38-40). Alors que la première condition semble ici remplie par les consommateurs versant de l’argent comme caution sur le récipient en verre dont l’acquisition est nécessaire pour acheter une boisson/yaourt, la deuxième condition est ici plus difficile à cerner. D’une part, l’acompte doit être payé au moment de l’achat, il pourrait donc être considéré comme inévitable. D’autre part, les consommateurs peuvent récupérer leur argent s’ils retournent l’emballage, ce qui pourrait rendre le paiement finalement évitable (paragraphe 48). La question est alors de savoir si l’on évalue le caractère inéluctable du paiement au moment de l’achat d’un produit, ou en regardant de manière holistique une transaction donnée. Même dans ce dernier cas, il pourrait y avoir des situations où les consommateurs ne restitueraient pas la caution et perdraient ainsi le paiement, pas nécessairement volontairement. La Commission attire l’attention dans sa communication sur le fait que les touristes peuvent quitter le pays avec un conteneur et ne pas être en mesure de revenir, que les conteneurs en verre peuvent facilement être brisés ou même réutilisés par les consommateurs eux-mêmes à domicile, ce qui ne permettrait pas aux consommateurs de récupérer le dépôt (paragraphe 49). Pour AG Emiliou, il ne s’agirait cependant pas de situations typiques (paragraphe 51), invoquant l’affirmation du gouvernement allemand selon laquelle, au moins dans le cas des conteneurs en plastique, 96 % seraient renvoyés pour être recyclés. Il y a cependant une différence dans la durabilité des récipients en plastique par rapport aux récipients en verre, et l’Allemagne a une longue histoire dans les efforts de recyclage, par rapport à de nombreux autres pays européens. Cependant, on ne peut qu’être d’accord avec AG Emiliou que la caution au moins peut et même doit être remboursée (par. 52)ce qui pourrait amener la CJUE à conclure qu’il s’agit d’une partie évitable du prix.
Prix de vente vs prix unitaire
Un argument intéressant pour ne pas compter l’acompte dans le prix de vente est avancé par AG Emiliou en référence à la nécessité de permettre aux consommateurs d’avoir un aperçu du prix unitaire d’un produit. En effet, si nous incluions le prix de consigne dans le prix du produit, cela pourrait obscurcir la comparaison entre les prix des yaourts/boissons des concurrents, si les consommateurs retournaient l’emballage et étaient remboursés de leur caution (paragraphes 59-61, 65). Dans le même temps, AG Emiliou n’accorde pas suffisamment de poids à l’argument de la Commission, à mon avis, selon lequel le fait de ne pas inclure l’argent de consigne dans le prix de vente peut induire en erreur les consommateurs (en particulier les consommateurs vulnérables) quant au prix total du produit à l’heure actuelle de son achat (paragraphe 62).
Contexte environnemental
‘Les consignes sont avant tout des outils de politique environnementale… » – commence ainsi le paragraphe 69 introduisant les arguments d’AG Emiliou basés sur l’agenda vert des décideurs politiques de l’UE, mettant en évidence divers développements récents visant à promouvoir le recyclage des emballages de biens de consommation. Cela se termine par une allégation selon laquelle en fractionnant le prix, en fournissant un devis séparé pour la consigne, l’attention des consommateurs peut être plus facilement attirée sur le fait que le contenant pourrait être recyclé ou réutilisé (paragraphe 77). Premièrement, cet argument fait valoir des revendications de conception/transparence de l’information, sans toutefois les justifier en se référant à une quelconque littérature montrant que fournir aux consommateurs un prix distinct augmenterait effectivement leur prise de conscience de la recyclabilité d’un contenant. Deuxièmement, il est intéressant d’observer comment une interprétation menée à travers le prisme des objectifs politiques actuels pourrait donner un nouveau sens aux anciennes dispositions.